« Ça fait plaisir de voir que ça me soutient / Comme de voir ma tête sur les flyers / L’argent m’attire j’vais pas vous mentir / Il manque que ça pour pouvoir m’en sortir / Si ça te fait plaisir alors danse sur ma zik / Encore un classique et ouais Jul c’est magique ». Voilà un extrait de la chanson Briganté du rappeur marseillais Jul, qui a explosé les charts français cet été. On passera sur le petit côté « je me fais mousser » des paroles. « Sur ma route, oui / Il y a eu du move, oui / De l’aventure dans l’movie / Une vie de roots ». Ces phrases-ci, aux rimes que l’on recherche encore, proviennent du refrain de Sur Ma Route de Black M, la révélation R’n’B 2014, lui aussi un ancien membre du groupe Sexion d’Assaut, à l’instar de Maître Gims. Apparemment jaloux du succès de son ancien collègue, Black M s’est dit qu’il était temps pour lui aussi d’entrer dans le Top 50 avec son propre projet solo, qui ressemble un peu à celui de Maître Gims, qui ressemblait déjà à celui de Sexion d’Assaut, finalement.
© DR Jul, qui fait un tabac avec son titre BrigantéAlors, quelle est la tendance générale de ces deux succès radiophoniques ? Premièrement, l’abus sans vergogne du vocodeur, ce dispositif électronique qui corrige les voix et gomme les fausses notes comme par magie. Sauf que l’effet se repère aisément car il donne un son robotique à la voix. Mais c’est une astuce assumée voire recherchée : ce son, c’est la grande tendance de l’année.
Ensuite, les rythmiques sont simplistes. Presque sorties d’un clavier Bontempi. Mais ça marche. Les gens se déhanchent sur le dancefloor. « Ce n’est pas prise de tête, ça nous parle du quotidien », explique Aurélia, 18 ans. « J’aime bien aussi DJ Hamida ou Indila, c’est frais pour s’ambiancer ». Chez ces deux artistes, on retrouve également une constante : les voix féminines vocodées viennent régulièrement en renfort des voix masculines typées rap au moment du refrain. Comme l’illustration sonore de l’expression « un peu de douceur dans un monde de brutes ».
Une mise à jour des sonorités « eurodance » des années 90
Carton de l’été grâce à ces habituelles sonorités festives et tropicales : les Magic System, avec Magic In The Air, un tube taillé pour les boîtes (parce que le refrain stipule qu’il faut lever les mains en l’air, ce que curieusement les clubbers adorent faire). Ce qu’il faut bien comprendre, c’est l’omniprésence des sonorités « eurodance » des années 90. L’eurodance, c’était ce style techno/pop qui faisait le bonheur des Top 50 européens entre 1990 et 1997 : Whigfield, 2 Unlimited, Robert Miles... Le retour en grâce de ces sons électro a priori demodés est-il surprenant ? Non ! Les spécialistes musicaux l’affirment : les Américains ont découvert ce son européen bien plus tardivement, dans les années 2000. Le temps qu’il rentre dans les moeurs, qu’il soit remis au goût du jour et que les faiseurs de tubes planétaires s’en emparent (Madonna, Rihanna, Daft Punk...) et revoilà le son des années 90 de retour chez nous. Ou l’éternel recommencement appliqué à la musique. M.O.
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