Le jour où nous avons rencontré Pierre Fraenkel, il venait de coller deux affiches, dont un « Bling Bling/ Vroom Vroom/Crak Crak ? » rue Franklin à Mulhouse, une question qui nous interpellait deux jours après l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn pour tentative de viol. « Je fais rarement de la provoc, mais je constate que la politique se dégrade quand elle devient mondaine et ostentatoire ».
© Pierre Fraenkel Pierre Fraenkel affiche très régulièrement sa pensée sur les panneaux de MulhouseSon mode opératoire est simple : il prend son pot de peinture et de colle sous le bras, dégote un panneau d'affichage libre, et passe à l'acte devant le regard surpris des passants et parfois même de la police. Pourtant, cette pratique est totalement légale : « Tout le monde peut utiliser ces panneaux si c'est à but non lucratif. Mais personne ne le fait sauf les associations. Moi, mon rôle, c'est de dire que si un jour les gens ont quelque chose à dire, ils peuvent le faire avec ce support. »
Lui ne s'en priva pas, collant à tout va. Jusqu'à 250 affichages dans toute la France. Car il faut coller beaucoup pour être vu, dans la mesure où une œuvre peut être recouverte 10 minutes après la pose. « C'est le revers de la médaille mais ça en vaut le coup », confie l'artiste. Il aime bien rester et voir la réaction des passants, et découvrir le sens qu'elle prend sous d'autres yeux, des sens auxquels il n'avait même pas pensé.
Mais comment un artiste sortant des Beaux-Arts en vient à investir la rue ? Il y a bien sûr la difficulté à se faire une place dans le monde de l'art, mais aussi un déclic venu d'un négatif trouvé par terre il y a cinq ans, représentant deux gamins dans les années 30. « Je suis curieux et sentimental, alors je l'ai développé en grand format et affiché de façon sauvage. J'ai ensuite acheté beaucoup de photos sur les marchés aux puces. Pour moi, elles ont un caractère vivant, c'est un moment qui a existé et que j'aime faire revivre », nous dit-il en nous montrant une photo d'un inconnu dans son portefeuille, côtoyant celle de son neveu.
Après les images, est venu le temps des mots, « un langage plus rapide et plus lisible». Mais il y avait un hic, un problème d'orthographe : « Plutôt que de me galérer à faire des fautes, j'ai commencé à écrire des mots phonétiquement. Je me suis rendu compte que je faisais de la poésie, que cela avait plus de force visuellement», déclare celui qui ne ne s'embarrasse plus à conjuguer le verbe faire mais écrit vite «fée », bien «fée ».
Le passant curieux aura pu admirer les différents phases de son travail. Il y a eu la série des sirènes, des pin-ups et des dessins érotiques...Il y a eu les héros des dessins animés : Goldorak, Bip Bip le Coyotte, Lucky Luke... «Ce qui m'intéresse, ce sont les lieux communs, ce qui nous unit plutôt que ce qui nous différencie », glisse-t-il.
Il a aussi versé un temps dans la religion, avec ces photos de femme priant et se demandant « Ne nous reste-t-il qu'à prier ». «Je ne faisais pas du prosélytisme mais je me demandais juste si on été tous foutu parce qu'à l'époque, il y avait une hypermédiatisation des catastrophes par rapport à l'écologie et on avait l'impression de vivre sous le coup d'une menace apocalyptique. Ca me rappelle un truc que j'avais écrit : Fessenheim mon amour ». Tiens, tiens, ces oeuvres ne sont peut-être pas si éphémères que cela puisse paraître...
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