Bruce Nauman: Disappearing Acts

L’espace Schaulager à Bâle présente la première grande rétrospective consacrée à Bruce Nauman depuis 25 ans. Une visite parfois déstabilisante dans l’œuvre et la tête d’un artiste qui compte parmi les plus influents d’aujourd’hui.

Né en 1941, l'artiste américain Bruce Nauman fait figure de pionnier dans l’art contemporain. Il a utilisé tous les supports pour s’exprimer, s’ouvrant toujours aux nouvelles technologies : hologrammes, vidéos, 3D, sculptures, néons, photographies, performances…

Cette grande exposition retrace ses 50 ans de carrière, faite d’interrogations sur l’art, le corps, le mouvement, le langage, le son, la condition humaine, avec un fil conducteur : les actes de disparition de l’artiste.

Cela commence dès la première œuvre exposée, « Venice Fountains » (2007), proche du ready made : deux masques à l’envers, moulage du visage de l’artiste, crachent de l’eau dans deux éviers qui s’écoulent ensuite dans un seau. « Cette œuvre plastique rudimentaire est en quelque sorte le portrait de l’artiste absent » commentent Heidi Naef et Isabel Friedli qui ont contribué à l’exposition.

Pourtant, l’artiste est ultra-présent dans cette exposition, dans un exercice de narcissisme parfois très poussé, comme le prouve ses études de son propre corps (« Six inches of my knee extended to six feet ») ou de son propre nom (« My last name exaggerated fourteen times vertically »).

Briser les conventions établies

L’artiste se met aussi en scène - et parfois dans sa plus grande intimité - dans des films très conceptuels réalisés à la fin des années 60 où il étudie l’interaction entre le corps et l’espace : Bruce jette deux balles sur le sol pour étudier les différents rebonds, Bruce se met un doigt dans les orbites, Bruce exécute 130 positions au sol… Se faisant, il s’interroge sur le rôle de l’artiste et de l’art en général : « Ma conclusion fut que, comme j’étais un artiste dans mon atelier, tout ce que je faisais dans l’atelier devait être donc de l’art. […] À ce stade, l’art devenait plus une activité et moins un produit. »

Fort de cette conviction, il brise toutes les conventions établies, utilisant des matériaux peu coûteux comme la fibre de verre ou la résine de polyester pour ses sculptures, concevant des maquettes au caractère souvent inachevé.

Dans les années 80, l’artiste se focalise sur un triptyque : violence, sexe et mort. Il s’appuie alors sur un objet qui deviendra une de ses marques de fabrique : le néon. Symbole de la consommation et de l’hédonisme, Bruce Nauman le détourne pour faire clignoter des mots comme WAR ou étaler toute la violence de la société américaine comme dans l’emblématique « Sex and Death by Murder and Suicide »(1985) qui alterne scène d’accouplements et de meurtres.

Il conçoit aussi des installations sinistres comme « Clown Torture », sorte de maison des horreurs qui passent en boucle des saynètes de clowns peu engageants sur quatre moniteurs, ou ce manège macabre constitué d’animaux qui traînent une patte au sol et viennent racler le sol dans un bruit métallique.

Confronter le bien et le mal

Bruce Nauman aime mettre mal à l’aise le spectateur : il scande ainsi d’une voix haletante ou sourde « Get out of my mind, Get out of my room » dans une salle obscure ou force un comédien à une pantomime oppressante dans « Shadow Puppets and Instructed Mime », une des pièces les plus impressionnantes de l’exposition.

Les instructions et les injonctions sont récurrentes dans son œuvre, comme pour mieux dénoncer une société trop moralisatrice ou normative. Il en est ainsi dans « Seven virtues/Seven vices », qui superposent des mots contraires comme la justice et l’avarice sur une dalle calcaire qui ressemble à une pierre tombale.

C’est encore plus explicite dans « Good Boy Bad Boy » où il fait réciter à deux comédiens filmés une centaine de phrases toutes faites comme : « Je suis un bon garçon. Tu es un bon garçon. Nous sommes des bons garçons. C’était bon », qui tourne vite à la cacophonie.

Bruce Nauman confronte ainsi sans cesse le bien et le mal : « Mon œuvre relève d’une frustration sur la condition humaine », explique-t-il.

 

Renseignements

Schaulager - Bâle 4056 Bâle

Dates et horaires :

Du Samedi 17 Mars 2018 au Dimanche 26 Août 2018

Tarifs :

NC

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