L'impressionnisme en Allemagne. Max Liebermann et son époque

Le Musée Frieder Burda de Baden-Baden dévoilera du 3 octobre 2025 au 8 février 2026 une exposition temporaire de grande envergure qui portera sur l’impressionnisme allemand. Grâce à plus d’une centaine de chefs-d’œuvre provenant de quelque 60 collections privées et musées internationaux, l’exposition Max Liebermann et son époque donne un aperçu à multiples facettes de l’ensemble du développement du mouvement, des années 1880 aux années 1920. Des œuvres mondialement connues d’artistes tels que Max Liebermann, Lovis Corinth et Max Slevogt sont exposées aux côtés d’œuvres de peintres qui méritent d’être redécouverts, comme Dora Hitz, Philipp Franck, Gotthardt Kuehl, Sabine Lepsius, Eva Stort et Max Uth. Parmi les nombreux prêteurs, on compte notamment l’Alte Nationalgalerie de Berlin, la Galerie Neue Meister de Dresde, le Städel Museum de Francfort-sur-le-Main, la Neue Pinakothek de Munich, le Musée d’Orsay de Paris et le Belvédère de Vienne. 

© © Museum Frieder Burda_collection privée L'impressionnisme en Allemagne. Max Liebermann et son époque

Des années 1860 à 1870, l’art de l’impressionnisme avait mûri à Paris. Cette nouvelle peinture se caractérise par une orientation vers le monde moderne, que des artistes comme Claude Monet et Pierre-Auguste Renoir mettent en scène avec un pinceau énergique. Dans l’exécution souvent esquissée de leurs compositions, la couleur, en tant que valeur propre expressive, revêtit une importance inégalée jusqu’alors - un pas important vers l’abstraction. 

Sous l’égide de Max Liebermann (1847–1935), l’impressionnisme devint à la fin du XIXe siècle également l’avant-garde dominante dans l’Empire allemand. Sur le plan des motifs, les artistes se sont penchés sur une multitude de sujets : des représentations de paysages inondés de lumière aux natures mortes soigneusement arrangées, en passant par des tableaux de personnages sensibles. Ils ont souvent puisé leur inspiration dans les œuvres de leurs collègues français qu’ils ont pu étudier lors de leurs voyages à Paris. A cela s’ajoutent des expositions dans des galeries comme le salon de Paul Cassirer, où l’on pouvait régulièrement voir des tableaux d’Edgar Degas, d’Édouard Manet et de Claude Monet, notamment. Le directeur de la Nationalgalerie, Hugo von Tschudi, a acquis dès le courant des années 1890 des œuvres importantes de l’art moderne français. Liebermann constitua dans ce domaine une collection privée de haut niveau que les invités pouvaient admirer dans sa villa au bord du lac Wannsee. À l’instar de Claude Monet à Giverny, il y aménagea en 1909 un jardin richement entretenu, dont la floraison multicolore devint bientôt le motif principal de son œuvre impressionniste.

L’exposition au Museum Frieder Burda rend non seulement hommage à Liebermann comme artiste majeur, mais examine également son influence exceptionnelle en tant que collectionneur, commissaire d’exposition et mentor. Dans l’empire ultra-conservateur, le peintre juif était, en tant que président de la Sécession berlinoise, une voix courageuse en faveur du progrès, de l’internationalité et de la nouveauté - et une figure importante dans les échanges culturels avec la France. L’État français avait déjà acquis en 1894 son tableau de genre Brasserie de campagne à Brannenbourg (1893, Musée d’Orsay, Paris) pour la collection du musée du Luxembourg - un indice important de son succès international précoce. Deux ans plus tard, l’artiste entra dans la Légion d’honneur. Liebermann mourut deux ans après la prise de pouvoir des nationaux-socialistes, qui a mis un terme abrupt au développement de la peinture moderne en Allemagne. Sa veuve Martha Liebermann choisit de se suicider en 1943, quelques jours avant sa déportation prévue vers le camp de concentration de Theresienstadt. Sa fille Käthe et sa jeune petite-fille Maria avaient déjà réussi à s’exiler aux États-Unis en 1938. La vaste collection de Liebermann sur la peinture impressionniste française se trouve aujourd’hui en grande partie dans des collections de l’autre côté de l’Atlantique. À bien des égards, sa villa d’artiste au bord du lac Wannsee n’est pas seulement un héritage culturel, mais aussi un mémorial politique profond.

L’exposition Impressionnisme en Allemagne met en exergue la contribution de Liebermann à l’art et à la culture allemande dans le contexte de ses compagnons de route progressistes. Les œuvres de plus de 20 peintres sont classées selon huit chapitres thématiques : 1) « Scènes de la vie quotidienne. Peinture de genre », 2) « Peintres de la vie moderne. Oisiveté bourgeoise », 3) « Poses dramatiques. Le monde comme scène », 4) « La Ville comme spectacle. Scènes urbaines », 5) « Grandes attentes. Images d’enfants », 6) « Dehors en plein air. Paysage et nature », 7) « Libération de la couleur. Nature morte », et 8) « Un paradis terrestre. Le jardin de Liebermann ». Parmi les nombreux points forts de l’exposition figurent des icônes de l’impressionnisme allemand comme Samson et Dalila de Max Liebermann (1902, Städel Museum, Francfort-sur-le-Main), Femme lisant près d’un aquarium à poissons rouges de Lovis Corinth (1911, Belvédère, Vienne). L’air du Champagne du Don Juan de Max Slevogt (1902, Staatsgalerie Stuttgart) ou Chambre d’enfants de Fritz von Uhde (1889, Hamburger Kunsthalle). Il faut également souligner un groupe ciblé d’œuvres importantes de femmes peintres, aujourd’hui largement oubliées, qui ont pu s’affirmer artistiquement dans l’Empire allemand, parmi lesquelles Dora Hitz, Sabine Lepsius, Marina Slavona et Eva Stort.

L’exposition est placée sous le haut patronage du Président fédéral Frank-Walter Steinmeier. Le partenaire de coopération est le musée Barberini de Potsdam, où l’exposition sera présentée du 28 février au 7 juin 2026.