Au départ, je souhaitais écrire sur le personnage de la mère, la Ida, l'histoire d'une vieille dame qui doit subir l'exil et tout réapprendre comme une petite fille. Ce qui m'intéressait, c'était la transposition des rôles, entre la fille qui devient la mère, et la mère qui devient la fille. C'est une histoire drôle et dure à la fois. Après, l'intrigue a pris d'autres tournures, d'autres personnages sont apparus, et c'est redevenu l'histoire de Yocandra.
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Interview de Zoé Valdés qui publie Le Paradis du néant
Il y a des passages dans le livre que j'ai réellement vécus, d'autres qui sont complètement inventés. Je suis partie de chez moi à 17 ans, donc quand j'ai retrouvé ma mère, cela n'a pas été facile de vivre de nouveau ensemble. J'ai vécu cette inversion des rôles et redécouvert des choses que j'avais complètement oubliées et elle aussi. C'était des moments extraordinaires. Ma mère était un peu comme la Ida : drôle, dure et exigeante. Mais d'autres femmes m'ont inspiré. Dans la littérature, le personnage de la mère fascine beaucoup les écrivains parce qu'elle a à voir avec la force, le pouvoir, la domination et la dépendance.
Même si elles sont mortes, on ne se libère jamais des mères. Elles sont là et c'est tant mieux, dans nos souvenirs, nos moments durs, nos émotions profondes.
Dans mon exil, j'ai rencontré pas mal de Cubains qui n'en pouvaient plus des Cubains. Quand ils se rencontrent en exil, ils ont une réaction difficile envers ceux qui leur sont proches, ceux qui leur renvoient leur propre image : c'est comme un miroir.
Chez les Cubains, la dictature a suscité une telle méfiance que les personnes reproduisent ce qu'ils ont vécu à Cuba : ils forment des groupes de surveillance et ont besoin d'un leader. Les exilés argentins à Paris sont par exemple beaucoup plus solidaires.
C'est parce qu'il y a les vrais exilés et ceux qui sont envoyés pour surveiller les exilés. C'est une spécificité du communisme : ça concerne les Cubains mais aussi les gens des pays de l'Est. On ne peut pas imaginer qu'on va vous envoyer quelqu'un pour vous surveiller mais ça existe vraiment : si je voulais sortir un livre dans une maison d'édition, je retrouvais comme par hasard un Cubain, un castriste, défenseur de la révolution, avec une opinion opposée à la mienne. Ce n'est pas grave en soi d'avoir des opinions différentes, mais il me dénigrait, disait que je n'étais pas la bonne personne, et c'est ainsi qu'on m'a fermé des portes dans pas mal d'endroits. Donc cette paranoïa est réel : on devient parano parce qu'on l'a vécu.
C'est le rôle de l'écrivain d'être critique. Déjà vis-à-vis de lui-même et le personnage de Yocandra montre bien qu'elle n'est pas très contente de ce qu'elle est et de ce qu'elle a fait. Mais aussi de la société.
J'adore la choucroute et l'Alsace (rires). Mais c'est vrai qu'il y a un moment où l'on doit présenter tellement de fois le même livre qu'on a l'impression de devenir un perroquet international et de participer à un marathon. En même temps, la durée de vie des livres est de plus en plus courte et cela nous permet de la rallonger un peu. J'aime bien faire des lectures, lire des passages qui sont sortis de ma tête et de mes mains.
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