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Rencontre avec Sandrine Pirès : un théâtre hors des sentiers battus

La metteure en scène Sandrine Pirès a fondé sa compagnie Le Gourbi Bleu pour faire vivre le théâtre hors des murs et conquérir un public qui n’en est pas féru.

Propos recueillis en décembre 2013.

Sandrine Pirès mettra en scène un Kassik Lounge le 17 janvier aux Dominicains, avec les élèves du conservatoire de Freiburg. © Sandrine Bavard Sandrine Pirès mettra en scène un Kassik Lounge le 17 janvier aux Dominicains, avec les élèves du conservatoire de Freiburg.

Petite, elle se rêvait chorégraphe. Aujourd’hui, elle est metteure en scène. Plutôt à tirer les fils qu’à être en pleine lumière. Et quand bien même Sandrine Pirès fait la comédienne, elle se fait oublier. Dans Ma voisine n’écoute que Beethoven aux Dominicains, elle fut ladite voisine qui vient mettre la pagaille dans les concerts, sans que le public sache qu’elle est comédienne.

Cette année, elle va lancer des brigades théâtrales, chargées de donner de fausses conférences sur le désastre, dans des lycées francs-comtois en partenariat avec le Théâtre du Pilier à Belfort : « L’enseignant sera prévenu, pas les élèves, pour créer un choc artistique. Il faut inventer de nouvelles formes pour donner envie aux jeunes d’aller voir du théâtre, et leur dire qu’il peut faire irruption au plus près d’eux », explique-t-elle.

Sandrine Pirès se méfie d’un théâtre convenu et facile. Il faut dire que ses premières expériences théâtrales l’ont plutôt déçu : « J’ai vu On purge bébé de Feydeau et j’en garde un souvenir terrible, avec deux hommes en grenouillère avec des tétines, j’ai trouvé ça tellement grossier. J’ai vu aussi Les fourberies de Scapin de Molière, qui avec ses décors, ses comédiens, relevaient plus du théâtre (elle accentue le « â » de théâtre, ndlr), mais c’est exactement le contraire de ce que je fais aujourd’hui : selon moi, il ne faut pas que les acteurs se voient. »

Un principe qu’elle met en application dès son premier spectacle J’étais dans la maison et j’attendais que la pluie vienne de Lagarce, créé à Wesserling et en tournée dans des lieux incongrus. « J’ai adoré faire ça : dans une ferme, on a mis des cagettes pour faire des gradins et accueillir 100 personnes. Je me suis toujours servi de la configuration des lieux pour que le public ait l’impression que ces cinq femmes vivaient-là. »

Sur tous les registres

Le théâtre hors des murs, c’est un peu le dada de Sandrine Pirès, c’était même le sujet de son mémoire dirigé par Matthew Jocelyn, directeur alors de l’Atelier du Rhin à Colmar. C’est là-bas où elle a tout appris, qu’elle fait ses premiers pas d’assistante metteur en scène au côté de Patrice Verdeil ou Catriona Morrison.

C'est aussi là qu’elle joue en appartement une pièce écrite par Lionnel Astier, qu’elle observe des incontournables du théâtre français comme Pommerat ou Braunschweig. Mais à 25 ans, en 2005, elle quitte cette « place dorée » et monte sa compagnie Le Gourbi Bleu : « Gourbi, ça veut dire lieu de vie en arabe. C’est un peu ma vision du théâtre, un lieu qui rassemble et qui n’a pas d’étiquettes, au service du vivre ensemble », commente-t-elle.

Après sa tragédie de Lagarce, elle s’essaye à la comédie avec Jusqu’à ce que la mort nous sépare de Rémi de Vos, sur les conseils de Pierre Guillois, dont elle est l’assistante au Théâtre du Peuple à Bussang.

Changement de registre encore avec Bazar, une pièce autobiographique, créée en 2012 à la Filature et à l’Agence culturelle d’Alsace : l’histoire d’une petite fille qui joue dans le magasin de son père pendant les vacances, un magasin qui va fermer à cause de la crise.

Conquérir un nouveau public

Celle qui voulait devenir institutrice par défaut aime aujourd’hui transmettre son savoir, à travers des ateliers, comme dans l’option théâtre du lycée Camille Sée de Colmar, où elle était élève.

Mais aussi capter l’intérêt d’un public qui ne va pas au théâtre, comme lors des fenêtres de l’Avent à Uffholtz : « On a fait un spectacle d’ouverture avec des amateurs et des pro qui se rencontrent le jour J, et doivent affronter 500 personnes dans la rue, avec certaines qui viennent boire du vin chaud et qui en ont rien à faire. C’est d’une violence ! Ma lutte, c’est d’intéresser des gens comme eux au spectacle vivant, qu’ils prennent conscience qu’il peut avoir lieu que s’ils le regardent ! »

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