L'artisanat en Alsace : le point avec Bernard Stalter

Avec au total 25 000 entreprises artisanales disséminées sur toute la région, dont 4100 dans le seul secteur du bâtiment dans le Haut-Rhin, l'artisanat peut se targuer d'être la première entreprise d'Alsace, employant au passage plus de 120 000 salariés. Questions à Bernard Stalter, le président aux belles bacchantes de la Chambre de Métiers d'Alsace. Par Mike Obri

JDS : Bernard Stalter, avec l'arrivée des normes et des solutions liées au développement durable et aux économies d'énergie dans le bâtiment, les artisans ont-ils bien su négocier le virage ?

© CMA Bernard Stalter, le président de la Chambre de Métiers d'Alsace

B. Stalter : Aujourd'hui, plus aucune entreprise du secteur du bâtiment ne doit pouvoir se passer de connaître parfaitement les normes et les enjeux liés à la Basse Consommation et au développement durable. C'est un défi important et les organisations professionnelles travaillent énormément à la formation continuelle des différents corps de métiers. L'évolution est si importante et rapide qu'il est nécessaire de sensibiliser et surtout de former les chefs d'entreprises et les salariés. Tous les secteurs sont concernés, le gros oeuvre et les chauffagistes évidemment, la filière bois, le sanitaire...

Vous souhaitez protéger la dénomination d'artisan et mieux valoriser le savoir-faire. Pouvez-vous nous expliquer la différence entre un "Artisan" et un "Artisan Maître" ?

Aujourd'hui, pour revendiquer la qualité d'artisan, il faut un diplôme certifié dans le métier, à partir du CAP, ou six années d'expérience professionnelle. A ce titre, nous nous battons pour "durcir" l'accès à la dénomination d'artisan, et pour que dorénavant soit considéré comme artisan celui qui justifie du diplôme et de six ans d'expérience. En ce qui concerne la dénomination "Artisan Maître", celle-ci est réservée aux dirigeants et chefs d'entreprise titulaires du Brevet de Maîtrise de leur métier. Cela démontre le savoir-faire de celui qui possède un tel titre.

Le consommateur peut s'y perdre avec l'émergence des nombreux labels de qualité dans l'habitat : qualibois, qualifioul, qualifelec, il y a des "quali - à peu près tout". Dur de s'y repérer, non ?

Les labels se sont peut-être trop développés, c'est vrai, mais les différentes organisations professionnelles travaillent à regrouper ces chartes de qualité et à faire en sorte que ça soit plus lisible pour les gens à l'avenir.

Enfin, comment se porte le secteur de l'artisanat dans le bâtiment ?

La situation est plutôt compliquée en ce moment. Les mesures fiscales (ndlr : notamment le relèvement de la TVA de 5,5 à 10%) ne vont pas du tout dans le bon sens. Il y a aussi le problème du dumping social... Des entreprises originaires de pays où la main d'oeuvre est moins chère viennent travailler ici et pratiquent des tarifs impossibles à tenir pour les artisans alsaciens. Beaucoup en souffrent, c'est difficile. C'est d'autant plus contradictoire que l'artisanat jouit aujourd'hui d'une bonne image, que le savoir-faire est valorisé, que les conditions de travail ne sont plus les mêmes qu'il y a vingt ans. On est une des planches de salut de l'économie française et de l'emploi des jeunes, on ne délocalise jamais, on crée du dynamisme et on accepte des jeunes de tous bords. L'artisanat est un vrai ascenseur social, et il ne faudrait pas l'oublier !