Momix 2016

Depuis 25 ans, Momix, le festival pour le jeune public, veut « faire battre votre cœur à la fois de spectateur et de citoyen ». Rencontre avec Philippe Schlienger, son directeur artistique, toujours aussi engagé qu’aux premiers jours.

Momix a un quart de siècle. Quel bilan tirez-vous ?

C’est d’abord une aventure humaine, qui place la culture au coeur d’un projet politique. Dans une ville de 12000 habitants, l’objectif n’était pas forcément de faire un événement de trop grande dimension.On a été pionnier : à un moment où il n’existait pas beaucoup d’offres pour le jeune public, on a fait écho à la création artistique en train de se développer. On a séduit les publics et les professionnels assez rapidement, jusqu’à devenir une référence dans le domaine. En travaillant avec d’autres partenaires culturels, on a obtenu une reconnaissance au niveau du département, de la région et même du Grand Est. 25 ans, c’est le temps d’une génération, et on note l’enthousiasme de jeunes parents, venus enfant sur le festival, qui reviennent aujourd’hui avec leur progéniture.

En 25 ans, le festival n’a rien perdu de ses engagements…

Le festival est resté fidèle à lui-même : c’est un espace d’exploration. On ne cherche pas à séduire à tout prix. On ne programme pas que des spectacles qui font plaisir, mais aussi des spectacles qui ont une plus-value artistique, qui interrogent le monde et véhiculent des valeurs humanistes. La caractéristique du festival pour le jeune public, c’est qu’il se renouvelle très vite, entre 80 et 100% tous les 5-6 ans : la culture, l’environnement et les enjeux des enfants changent. Et les artistes innovent sans cesse pour interroger ces réalités, comme avec l’arrivée du numérique : il est de plus en plus prégnant dans la création sonore et visuelle, et ce n’est pas qu’un gadget, il sert une vraie réflexion artistique et politique.

Vous tenez beaucoup à la notion de « spect’acteurs ». Comment les former ?

Sur les séances scolaires, tous les enseignants de Kingersheim sont formés et transmettent les bons codes aux enfants, car on ne va pas au spectacle comme on va à la piscine. Etre spect’acteurs, c’est être actif : de par son écoute, de par ses réactions, on va interagir avec ce qui se passe sur scène et dans la salle. Chacun dans son fauteuil, au niveau individuel, va ressentir ses propres émotions, émettre un avis. Mais il va aussi partager des moments collectifs de joie, de tristesse, de doute… Pour les familles, on a développé un carnet « Mes aventures de jeune spectateur », un outil de dialogue entre les enfants et les parents. Cela permet aux adultes de mieux comprendre ce qu’est le spectacle vivant et à l’enfant de créer son parcours artistique en notant ses émotions s’il en a envie.

Le Créa intervient aussi dans les classes à Kingersheim avec un parcours de découverte artistique. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’offrir aux enfants des activités complémentaires. Nous coordonnons le projet, en sélectionnant des artistes qui peuvent intervenir dans des ateliers pratiques mis en place par les enseignants qui peuvent durer une dizaines d’heure, sur le temps scolaire. On prend en compte le spectacle vivant mais pas seulement : il y aussi les arts plastiques, le cinéma, la musique …. L’enseignant peut utiliser ces apports dans différentes disciplines : en français, en sciences, en histoire…

Quelles sont vos envies pour les prochaines éditions ?

Il faut impliquer encore davantage les enfants et leurs familles, et faire en sorte que les enfants les plus démunis puissent accéder au spectacle vivant. Le spectacle n’est pas une finalité, il y a tout un travail à faire en amont avec des ateliers, des expos… On réfléchit à des projets participatifs, comme monter des spectacles où des comédiens amateurs auraient leur place. On veut que Momix soit vécu comme une fête, qui dépasse le temps du spectacle en lui-même.
☛ Propos recueillis par S.B

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