Le 7ème Continent à Rixheim : surtout, s'y laisser surprendre !

Nous avons décidé de lancer une série dans notre rubrique Gastronomie : nous allons vous faire entrer dans les coulisses des plus grands restaurants étoilés haut-rhinois. Les chefs se livrent. Les secrets de leur cuisine se révèlent.  Par Mike Obri

C'est avec Le 7ème Continent que nous poursuivons notre voyage gastronomique dans le Haut-Rhin. L'établissement de 50 couverts, situé au centre de Rixheim, se remarque facilement avec sa surprenante façade peinte. En 2015, le chef Laurent Haller, 44 ans, obtient sa première étoile au Guide Michelin. Une consécration inattendue, « une vraie surprise » dira-t-il. Une surprise ? Allons donc... « Je sais que tous les chefs disent ça : oh quelle surprise ! », s'amuse Laurent Haller.

© M.O. Laurent Haller et son fidèle second, Eric Lebienvenu

« Mais je vais vous dire pourquoi ça l'a vraiment été pour moi. Je venais de tout changer dans le restaurant, de le diviser en deux espaces distincts. D'un côté, un gastro pur et dur, et de l'autre un bistro, qu'on avait appelé le Bistingo. On avait acheté les banquettes, changé de déco, je venais de créer la carte depuis même pas une semaine. Et l'étoile est arrivée. Non, on ne s'y attendait vraiment pas ! Le Bistingo a dû être mis en suspens, il n'aura pas existé longtemps », détaille-t-il.

Formé chez Bernard Loiseau

Laurent Haller, né à Belfort, est arrivé en Alsace un peu par hasard. Il a perfectionné son art en travaillant dans une dizaine d'établissements partout en France. Tous étoilés. Au début des années 90, à force d'efforts et de travail, les portes du Saint Graal s'ouvrent à lui : il intègre la Côte d'Or à Saulieu, le trois étoiles de Bernard Loiseau. Une rencontre qui le marque à tout jamais. « Chacun de mes mentors m'a apporté quelque chose de différent. Mais La Côte d'Or, ça a été un choc ! Une brigade de 30 hommes de toutes les nationalités, un chef de partie anglais ultra carré... Et surtout, Bernard Loiseau, lui, c'était un personnage, un bonhomme, qui véhiculait des idées très fortes. Le produit, le produit, le produit, qu'il disait. Cet héritage-là, à ma manière, je le perpétue. La saisonnalité des produits, une cuisine épurée, c'est aussi ma philosophie. »

Laurent Haller se lève et nous montre alors les cuisines - oui, il y en a deux - la première où l'on décortique, pétrit et laisse mijoter ; la seconde, visible depuis la salle du restaurant grâce à une large baie vitrée, où l'on dresse et envoie. Il prend le temps d'expliquer à l'un de ses jeunes commis comment découper avec efficacité des langoustines. Puis montre à un autre comment réaliser une tarte tatin. Les gestes sont sûrs. Précis. « Le jeune m'a dit hier soir qu'il n'en avait jamais fait, ce matin, je lui montre. La transmission, c'est essentiel », explique-t-il. Preuve en est que jusqu'à l'arrivée de l'étoile, Laurent Haller donnait des cours de cuisine. Un de ses élèves, Frédéric Scheurer, est arrivé troisième à l'émission Masterchef sur TF1 en 2013. Mais difficile de se concentrer sur d'autres choses que Le 7ème Continent actuellement. À peine le chef s'autorise-t-il quelques parties de golf de temps en temps. Ça le détend.

La Carte Blanche

Passionné de vin, Laurent Haller nous emmène dans la cave de son restaurant. Quelques 6000 flacons s'y reposent. Dont quelques pépites. Le lieu, baigné d'un doux silence, est propice aux confidences. « Je me suis dit que je n'avais fait que travailler dans des restaurants étoilés... sauf le mien ! Il y a deux ans, je me suis fixé l'objectif de décrocher une étoile. Sans challenge, je n'avance pas. Je travaille mieux sous pression, j'ai été formaté comme cela toute ma carrière. Quand on est un passionné, c'est difficile de se freiner », révèle-t-il. « Heureusement, ma femme Stéphanie (ndlr : qui est chef de salle) me canalise. On se grogne un peu dessus parfois, mais je suis content de partager cette aventure avec elle. »

N'allez surtout pas demander à Laurent Haller s'il a une spécialité culinaire. « Surtout pas ! Je n'ai pas de plat-signature, ma signature, c'est l'ouverture. La découverte. Je change la carte intégralement tous les mois : peu la changent aussi fréquemment. Chaque mois, c'est une nouvelle prise de risques. Je veux surprendre les gens, qu'ils viennent découvrir ce que le chef leur a préparé comme s'ils étaient à une table d'hôtes. C'est pour cela que je propose deux formules Carte Blanche, à 4 ou 7 plats. Il y a une carte très courte à côté. Mais dans l'absolu, si je pouvais ne proposer qu'une unique Carte Blanche, rien d'autre, c'est ce que je ferais ! » Alors, notre petit conseil : accordez une confiance aveugle à Laurent Haller. Et il vous emmènera sur son merveilleux continent. Dont on ne sait jamais à l'avance de quoi il sera composé.

Le 7ème Continent, 35 av. du Général de Gaulle à Rixheim
03 89 64 24 85 - www.le7emecontinent.com